© Simon Blöchel, Goetterdaemmerung, Wuerzburg

Les Œuvres de Wagner

L'Or du Rhin
Il constitue le prologue des trois « festivals scéniques » qui composent avec lui L'Anneau du Nibelung.

Synopsis

Le Ring démarre en réalité avec le commencement de l'univers tel que le suggère le prélude de L'Or du Rhin dans son développementN 2. L'univers est représenté par un arbre, le Frêne du monde prenant ses racines dans la terre et s'élevant vers le ciel6. On trouve dans cette création les quatre éléments nécessaires pour la construction du monde : l'air, la terre, l'eau et le feu. Wotan représente l'air, c'est le dieu suprême. Sa demeure, le Walhalla, est établie sur les sommets. Il est associé à la pensée abstraite. La terre (« Erde » en allemand) est représentée par le personnage d'Erda, c'est le symbole du savoir intuitif en perpétuel sommeil, elle connaît tout du passé et de l'avenir. L'eau est figurée par le Rhin, un fleuve associé à l'idée d'évolution et de nature. Loge représente le feu, il est à la fois une destruction et une énergie vitale.

Wotan, en quête de pouvoir, se rend jusqu'au Frêne du Monde et boit à la source sacrée qui coule à son pied. Il acquiert le savoir rationnel mais il doit en échange y laisser son œil gauche, symbole de l'intuition et du sentiment. Guidé par la raison, il prend Fricka pour épouse au détriment de sa sœur Freia qui symbolise la jeunesse et l'amour, et qui est la seule à pouvoir cultiver les Pommes d'or dont la consommation assure aux dieux éternelles jeunesse et beauté. Fricka au contraire est calculatrice, manipulatrice, jalouse, conventionnelle (on dirait aujourd'hui 'psychorigide') et coquette (attirée par les bijoux). Toujours insatisfait, Wotan arrache une branche au frêne, il la transforme en lance. Par des runes il y grave ses lois, mais si la loi accroît son pouvoir, elle l'entrave également car il est tenu de respecter les lois qu'il édicte8.

Ces deux déséquilibres originels ne tardent pas à se faire sentir. L'arbre du monde dépérit. Le temps n'est plus cyclique, la nature est dégradée. Ceci va déboucher sur un monde ouvert à l'inconnu. Wotan devenu tout puissant chez les éléments (les dieux) introduit Loge (le feu) parmi eux après l'avoir asservi, cependant il est mal vu par les autres dieux et Freia lui refuse ses pommes d'or conférant la jeunesse éternelle. Loge n'est donc qu'un dieu à demi - « Je ne suis pas aussi divin que vous » - et n'aspire qu'à retrouver sa forme originelle. Il pousse tout d'abord Wotan à édifier une forteresse divine afin d'accroître toujours plus sa puissance en promettant de trouver un prix plus tard pour la financer, ce travail est donné aux deux derniers de la race des géants, Fasolt et Fafner. Wotan leur promet Freia (et ses pommes d'or) en gage. Fricka, soucieuse d'une belle demeure où enfermer un mari trop volage, acquiesce. Loge quant à lui part explorer le monde pour trouver comment substituer Freia.

Scène 1
Au fond du Rhin.
Trois ondines, les filles du Rhin, Woglinde, Wellgunde et Flosshilde nagent dans le Rhin. Les deux premières s'amusant à se poursuivre avec insouciance, leur sœur les rappelle à l'ordre : elles ont mission de garder l'or du Rhin, et elles s'en acquittent bien mal. Alberich, un nain de Nibelheim, apparaît soudain des profondeurs de la terre et essaye de leur faire la cour. Frappées par sa laideur, les filles du Rhin se moquent de ses avances, ce qui désespère le nain. Il remarque un éclat doré qui provient d'un proche rocher, et leur demande ce que c'est. Les ondines lui disent que c'est l'or du Rhin, que leur père leur a dit de garder ; seul celui qui renonce à l'amour peut forger l'or en un anneau qui donnera à son porteur « der Welt Erbe », « la richesse du monde ». Elles pensent n'avoir rien à craindre de ce nain lubrique, estimant que cet être est en constante recherche de l'amour comme le prouvent ses avances. Mais elles confondent amour et désir sexuel ; Alberich, aigri par leurs moqueries, maudit l'amour et s'empare de l'or, jurant de forger « l'anneau vengeur ».



Scène 2
Wotan, souverain des dieux germaniques (Odin dans la mythologie scnadinave), est endormi au sommet d'une montagne avec Fricka, sa femme (Frigga dans le panthéon scandinave). Celle-ci se réveille et voit un magnifique château derrière eux. Elle réveille Wotan et lui montre que leur nouvelle demeure a été terminée. Les deux derniers représentants de la race des Géants, les frères Fasolt et Fafner, ont construit le château pour Wotan. En échange Wotan leur a promis Freia, la déesse de la jeunesse, grâce à laquelle Fasolt et Fafner espèrent redonner vie et puissance à leur race, car Freia, déesse de la fécondité, cultive des pommes d'or qui confèrent jeunesse et vie éternelles à qui les consomment. Fricka est inquiète pour sa sœur, mais Wotan est convaincu qu'ils n'auront pas à donner Freia, car il a envoyé Loge courir le monde pour trouver un paiement de substitution.

Freia entre, terrifiée, suivie des géants Fasolt et Fafner. Fasolt demande le salaire du travail achevé. Il met en évidence le fait que le règne de Wotan est fondé sur les runes des traités gravés sur sa lance. Wotan doit respecter les traités sans quoi les Géants ne reconnaîtront plus son pouvoir. Donner, dieu du tonnerre et des orages (le Thor de lz mythologie scandinave), et Froh, le dieu du printemps, arrivent pour défendre leur sœur, mais Wotan les arrête : ils ne peuvent contraindre les Géants par la force. Comme l'a bien démontré Fasolt, le pacte qui livre Freia est inscrit sur sa lance, il a donc force de loi édictée par Wotan lui-même, qui ne peut se parjurer.

Au grand soulagement de Wotan, Loge, le dieu du feu (Locki dans la mythologie scandinave), fait son enfin son entrée ; Wotan a placé tous ses espoirs dans le fait que Loge puisse trouver un moyen rusé de tourner l'affaire à son avantage. Loge leur dit qu'Alberich, le nain, a volé l'or du Rhin et en a fait un puissant anneau magique qui permet à son possesseur de dominer le monde. Wotan, Fricka et les géants commencent tous à convoiter l'anneau, mais comment l'obtenir ? Par le vol, dit Loge, voler un voleur n'est pas du vol ! Fafner exige tout l'or des Nibelungen pour renoncer à Freia. Les géants s'en vont, emmenant avec eux Freia en otage.

Or les pommes d'or de Freia avaient gardé les dieux éternellement jeunes. Privés de ces fruits de jouvence, ils commencent à vieillir et s'affaiblir. Pour regagner la liberté de Freia et la jeunesse perdue Wotan est forcé de suivre Loge sous terre, à la poursuite de l'anneau.

Scène 3
À Nibelheim, Alberich a asservi le reste des nains et contraint son frère Mime — un habile forgeron — à créer un heaume magique : le Tarnhelm. Alberich démontre le pouvoir du Tarnhelm en se rendant invisible, pour mieux tourmenter ses sujets.

Wotan et Loge arrivent et rencontrent Mime, qui leur parle alors de l'anneau d'Alberich et de la misère que connait Nibelheim sous sa domination. Alberich revient, conduisant ses esclaves qui empilent un énorme monticule d'or. Quand ils ont terminé, il les chasse et tourne son attention vers ses deux visiteurs.

C'est alors qu'il se vante de ses plans pour dominer le monde. Loge le piège en lui demandant de prouver la magie du Tarnhelm. Il le défie de se transformer d'abord en dragon, puis en crapaud. Les deux dieux s'emparent alors de lui et le remontent à la surface.

Scène 4
Au sommet de la montagne, Wotan et Loge forcent Alberich à échanger sa richesse contre sa liberté. Main droite détachée, Alberich porte l'anneau à sa bouche et, utilisant les runes qui y sont gravées, murmure un ordre en secret. À l'appel de l'anneau, les nains asservis remontent le trésor à la surface avant de s'enfuir épouvantés sous la menace d'Alberich humilié. Après que l'or a été livré, Alberich demande qu'on lui rende le Tarnhelm, mais Loge affirme que c'est une partie de sa rançon. Alors qu'Alberich se croit enfin quitte, Wotan exige l'anneau. Alberich refuse et récuse violemment les arguments que Wotan avance pour s'octroyer l'anneau. À court d'arguments, Wotan utilise alors la violence, arrachant l'anneau du doigt d'Alberich pour le mettre au sien. Enfin libre mais anéanti, Alberich maudit l'anneau : celui qui ne l'a pas dépérira de désir et celui qui le possède attirera à lui l'assassin. « Le seigneur de l'anneau sera l'esclave de l'anneau ! » prophétise t-il, avant de regagner son ténébreux royaume.

Wotan n'a que mépris pour les paroles d'Alberich. Fricka, Donner et Froh arrivent. Wotan et Loge leur montrent l'or qui va servir à racheter Freia. Fasolt et Fafner reviennent, gardant Freia. Réticent à relâcher Freia, Fasolt déclare qu'il doit y avoir assez d'or pour la cacher à ses yeux. Les dieux entassent l'or devant Freia, mais Fasolt découvre un interstice par lequel il peut voir le regard de la déesse. Il exige que l'interstice soit comblé par l'anneau, qui est tout ce qui reste du trésor. Wotan refuse catégoriquement et les géants se préparent à emmener Freia pour toujours.

Soudainement, Erda, la déesse de la terre, surgit du sol. Elle prévient Wotan du déclin imminent des dieux et l'exhorte à fuir la malédiction en jetant l'anneau. Troublé, Wotan cède l'anneau et libère Freia. Les géants commencent à se partager le trésor, mais ils se disputent au sujet de l'anneau. Fafner tue Fasolt et s'enfuit avec le butin. Wotan, horrifié, prend alors conscience de la force de la malédiction d'Alberich.

Angoissé, Wotan voudrait poursuivre Erda pour en apprendre plus mais Fricka l'incite à prendre possession du château qui attend son maître. Donner invoque un orage pour chasser les nuées qui obscurcissent le ciel. Après la tempête, Froh crée un pont arc-en-ciel qui s'étire jusqu'aux portes du château et qui doit permettre aux dieux, sous la conduite de Wotan, de gagner leur nouvelle demeure. Reprenant courage, Wotan baptise le château « Walhalla » (Le château des guerriers). Fricka le questionne au sujet de ce nom, et il lui répond que sa signification sera révélée plus tard. En aparté, Loge l'affirme : les dieux, si sûrs d'eux-mêmes, courent à leur perte. Il se refuse à partager leur sort et envisage de reprendre la forme des « dansantes flammes », pour, qui sait, tous les consumer un jour... Soudain, une plainte arrive aux oreilles de Wotan. Ce sont les filles du Rhin qui pleurent l'or perdu. Irrité, Wotan ordonne à Loge de les faire taire, et entraîne les dieux, sauf Loge qui reste à part, dans la demeure qu'il a payée d'un salaire maudit. Les dernières paroles, avant la péroraison finale, reviennent toutefois aux filles du Rhin:

Traulich und Treu
ist's nur in der Tiefe:
falsch und feig ist,
was dort oben sich freut!

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